Incendie ? Oh. Tu veux dire crime brûlé.

Une longue journée de travail.
Une longue journée vide de sens.


Pour changer.

Je suis rincé-e et mentalement épuisé-e, courir pendant une heure ne m’a certainement pas calmé-e et je trépigne encore de faire quoi que ce soit, les nerfs à vifs sans pouvoir me détendre.

Oh, le travail n’a pas été compliqué.
Au contraire.
C’est bien ça le problème.
Je meurs d’envie qu’un problème arrive, un couac dans le système, un cas intéressant à défendre : quoi que ce soit qui me permette de sortir de cette déprimante routine.

Une douche et me voilà à arpenter les rues autour de la Cascade Divine, à la recherche d’un bon endroit pour lire. Qu’importe l’endroit pourvu que ça ne soit pas mon deux pièces que je connais déjà par cœur et qui me fatigue.
Je n’y ai emménagé que la semaine passée, mais je regrette déjà d’avoir fait mes cartons et quitté Constance et notre appartement. Quoique mon anxiété ne serait pas à un plus bas niveau si j’étais resté. La vie de couple monogame ? Très peu pour moi, l’expérience nous l’a prouvé.

Alors que je commence à penser que je ne trouverais rien et ferais mieux de m’installer à même le sol de la rue pour lire, les lumières d’un bar attirent mon regard.
Le Mirage of Silver Sunset, hein ?
Je crois qu’un de mes collègues m’en a parlé cette semaine.
Je m’immobilise dans la rue, pesant le pour et le contre.
Plein de mondes, de l’alcool, mais de la lumière et une température correcte. Surtout : une heure de fermeture tardive.
Je tâte mes poches et vérifie que j’ai bien mon portefeuille à côté de mon livre et de mes clés.

Cela ne calmera pas mon anxiété, au contraire, mais cela donnera à mon esprit quelque chose sur lequel se focaliser pour me laisser tranquillement lire.

Je traverse donc la rue et presque délicatement, pousse la porte du bar.
Il y a déjà bon nombre de gens créant un brouhaha agréable de discussion et de rire, l’odeur de café et d’alcool se mélangeant avec l’odeur de sueur. Il y a un bar au fond où se tient une amelouve, mais ce qui attire mon regard, c’est une scène lovée contre un mur.
Est-ce qu’il y aura un spectacle ce soir ? Si oui, quel genre de spectacle ? Je suis curieuxse, mais pas assez pour demander.
Il y a de la musique qui passe à la radio, presque discret et inaudible sous le bruit ambiant de bar.

La démarche assurée, je m’avance vers le bar et me place sur l’un des tabourets, le plus proche du mur du fond de façon à ne pas avoir à partager de trop mon espace avec d’autres.
La serveuse est une blonde aux poils agoutis portant une longue robe noire.
Elles sont rigolotes ces lunettes. Est-ce que ses clochettes font du bruit ? J’entends rien d’où je suis.
Je sors mon livre de ma poche et le pose sur le comptoir avant de lever un bras pour attirer son attention et pouvoir commander un café.

Par chance, la serveuse est rapide à me voir. La voilà qui s’approche de moi et me salue familièrement. Je commence à arborer un sourire avant de crisper celui-ci. Demoiselle, hein ? Bon, j’avoue, je suis doté d’une poitrine et la société n’a pas encore de titre entre monsieur et madame. Comme d’habitude je brosse ce mégenrage de côté car elle ne peut pas savoir, ce n’est pas sa faute si la société est ainsi faite.
“ Vous avez de la lumière et j’ai besoin d’un endroit agréable pour lire. “ je réponds franchement, décrispant mon sourire pour en arborer un plus détendue, mon coude se posant sur le comptoir pour mettre au niveau de ma tête mon livre. Ma lecture pour me détendre du moment ? Un traité d’agriculture sur les moutons. Est-ce que je m’intéresse à l’agriculture ? Certainement pas. Est-ce que je m’intéresse aux moutons ? Non, pas du tout, même si j’aime les pulls en laine. Qu’est-ce que je fiche avec un livre dont je me moque éperdument ? J’ai besoin d’évasion et les romans ne m’ont jamais satisfait-e sur ce plan.
Je repose mon livre.
“ Est-ce que ce serait possible d’avoir un café bien noir s’il vous plait ? “ je demande car si je veux squatter tranquillement je veux le faire dans les règles de l’art et cela requiert donc une consommation. Et quoi de mieux pour se détendre dans un bar qu’un bon café ? Cela accompagne à merveille les odeurs déjà présentes et une boisson chaude ne peut que me faire du bien.